Lutte contre la discrimination envers les candidats locataires.
04 mai 2017
Dans le cadre de la réforme du bail menée par le Ministre du logement, Pierre-Yves Dermagne (PS), une attention particulière est portée à la lutte contre la discrimination dans la sélection des candidats locataires.
Il s’agit, ici, de trouver l’équilibre entre, d’une part, ce qu’un propriétaire est en droit de demander pour s’assurer du bon usage de son bien immobilier et du paiement des loyers et, d’autre part, ce qui relève de la discrimination.
L’équilibre est difficile à trouver et je me réjouis de la position du Ministre Dermagne qui contraste avec celle de son prédécesseur sur certains points pour lesquels j’avais des réserves.
Retrouvez mon intervention et la réponse du Ministre ci-dessous.
M. Maroy (MR). – Monsieur le Ministre, le Gouvernement entend accentuer la lutte contre les discriminations au logement, dans le cadre de la réforme du bail. Il est question de prévoir une liste non exhaustive de documents qui ne pourront pas être sollicités par le propriétaire, sauf dans certains cas précis. Je dis d’emblée que je partage, évidemment, l’objectif poursuivi. Il faut faire reculer certaines pratiques qui sont contraires aux droits fondamentaux. Je vise par là une discrimination en fonction du sexe, de l’orientation sexuelle, de la race et des choses comme celles-là.
J’ai, en revanche, certaines réserves sur la méthode, en tout cas je me pose certaines questions. Je voudrais rappeler que le Centre interfédéral pour l’égalité des chances proposait d’établir une liste des informations ou justificatifs qu’il serait permis de demander à un candidat locataire. Il n’y a pas meilleur spécialiste de la question de la discrimination, me semble-t-il. Ce que ce centre préconisait, c’était une liste positive.
Étonnamment, votre prédécesseur n’a pas suivi cette option ; il a souhaité inverser la vapeur en optant pour une liste négative. D’après lui, « Une liste positive de documents dont il est permis de demander la production de la part du locataire devrait être exhaustive, avec le risque d’en oublier ou d’inciter les bailleurs de les demander automatiquement ». Je ne parle peut-être pas le « furlanien », mais je ne vois pas en quoi cela créerait un véritable risque de généralisation.
Quant à l’argument de l’oubli, il est valable dans les deux sens. Enfin, la liste n’a pas besoin d’être totalement exhaustive pour être utile. Ce qui me gêne le plus, c’est que nous n’avons, à l’heure actuelle, aucune vision sur le contenu de cette liste. On ne sait pas ce que le Gouvernement, ce que le ministre veut mettre dedans. De plus, aux dernières nouvelles, cette liste ne ferait pas partie du décret puisqu’elle serait établie par la suite.
Ne serait-il pas préférable d’avoir une liste positive et non négative, comme le suggère le Centre interfédéral pour l’égalité des chances ? Confirmez-vous que la liste ne sera pas insérée dans le décret ? Si vous confirmez cela, pour quelles raisons ? Pourquoi ne pas donner la possibilité au Parlement de débattre de cette liste ? Enfin, et c’est la question principale, êtes-vous en mesure de nous préciser le contenu de cette liste ou, en tout cas, de nous donner quelques orientations ?
À titre d’exemple, un bailleur pourra-t-il demander le nom, l’adresse et les coordonnées du précédent bailleur du candidat locataire ? Ce qui m’importe le plus, tout en étant d’accord évidemment avec le fait qu’il faille lutter contre les discriminations dont j’ai parlé tout à heure, c’est que la liberté contractuelle soit respectée et qu’un propriétaire puisse s’assurer que son candidat locataire ait les revenus suffisants pour pouvoir honorer chaque mois le loyer.
M. Dermagne, Ministre des Pouvoirs locaux, de la Ville et du Logement. – Monsieur le Député, je vous rassure puisque la logique entre la première et la deuxième lecture de l’avant-projet de décret a été inversée. En effet, dans la note au Gouvernement et dans l’avant-projet de décret modifiant diverses dispositions du Code civil relatif au bail d’habitation, adopté en deuxième lecture en mars, il est proposé de renverser le mécanisme en précisant expressément les informations pouvant être sollicitées par le propriétaire auprès du candidat locataire.
De plus, il est également prévu que des informations complémentaires pourraient être sollicitées si ces dernières poursuivent une finalité précise et sont justifiées par des motifs sérieux et proportionnés au regard du but poursuivi. Cela pourrait, par exemple, être le cas d’un bailleur qui demanderait à son locataire son numéro de plaque d’immatriculation, car le logement qu’il loue est assorti d’une place de parking.
Concernant l’intégration même de la liste au sein du texte législatif, l’avant-projet de décret reprend la liste des informations qui pourront être sollicitées, à savoir notamment le nom et prénom du ou des candidats locataires, un moyen de communication avec le candidat, son adresse actuelle ou encore le montant des ressources financières dont dispose le candidat preneur.
Le travail réalisé par mes collaborateurs a été effectué sur la base du travail déjà réalisé par Unia, vous l’évoquiez il y a quelques instants. De même, il est envisagé d’établir une fiche signalétique type qui sera réalisée en partenariat avec les acteurs concernés, et notamment Unia, et qui pourrait ensuite être mise à disposition du public afin de faciliter la tâche des propriétaires et d’assurer une protection accrue des candidats locataires.
M. Maroy (MR). – Je suis ravi parce que j’ai l’impression qu’autant je m’opposais régulièrement à M. Furlan, où l’on avait une logique souvent différente, autant votre logique me convient apparemment mieux. Je suis évidemment ravi d’entendre votre réponse et que l’on en revienne à quelque chose qui me semble plus cohérent, à savoir une liste positive, conformément à ce que préconise le Centre interfédéral pour l’égalité des chances. Ce sera plus clair comme cela, j’en suis persuadé.
Vous avez donné quelques éléments de ces documents qui pourront être demandés. Ce n’est pas une liste très longue ; je ne sais pas si elle est complètement finalisée, apparemment non. J’ai noté au vol que le propriétaire pourra s’assurer du montant des ressources financières du candidat locataire. C’est l’objectif auquel nous sommes attentifs : permettre au propriétaire de vérifier que son loyer pourra être payé. Cela me semble être totalement normal.
Concernant les contrats de travail, je sais que la législation ne permet pas – il y a eu des décisions de justice – la jurisprudence de permet de réclamer cela, mais peut-être une fiche de paie. Cela, c’est généralement le cas.
M. Dermagne, Ministre des Pouvoirs locaux, de la Ville et du Logement. – La décision que vous évoquez, c’est une décision relativement récente du Tribunal de première instance de Namur, qui évoquait le fait qu’il était interdit à un bailleur de solliciter de son candidat locataire la production d’un contrat de travail à durée indéterminée.
M. Maroy (MR). – La question se pose, par exemple, sur une fiche de paie. Un propriétaire pourra-til, comme cela se fait très régulièrement en France, par exemple – en France, c’est difficile d’obtenir un logement sans produire une attestation de revenus.
Il serait de bon sens qu’un propriétaire puisse s’assurer que le montant du loyer n’excède pas le tiers des revenus, puisque généralement, c’est la proportion qui est citée. Si j’ai bien compris, cette liste figurera dans le décret ?
M. Dermagne, Ministre des Pouvoirs locaux, de la Ville et du Logement. – Nous pourrons en discuter très prochainement au sein de cette commission et en séance plénière de ce Parlement.